pluésie

POÈMES LGBTQI+

imparfait

dans mes pupilles brillent deux mondes

qui dans les tiennes se reflètent

un dans chacune qui demande

et veut t’entendre dire d’une voix tiède

ces mots qui au fond de moi frissonnent

gravent sept lettres dans les plis de mon cœur

que mon être avide consomme

dans un rythme hard-corps

 

ne rien dire

ne rien faire

surtout pas en public

jamais

entends-tu

jamais

 

l’un des mondes est enragé

tandis que l’autre fond

de ton mystérieux effet

qui tous les jours me pourfend

 

ne rien dire

ne rien faire

surtout pas en public

jamais

entends-tu

jamais

 

à toujours enregistrée dans ma mémoire

ton apparence m’est familière

tes yeux ont la couleur de la mare

et tes ondulations celle de la nielle

un mélange d’onyx et de saphir

s’adaptant à mes propres nuances

habituées à être scotchées ainsi

aux tiennes drôle de mélange

dont le brassage est défendu

dont l’existence est réfutée

car la ressemblance est dure

et laisse les gens stupéfaits

 

ne rien dire

ne rien faire

surtout pas en public

jamais

entends-tu

jamais

 

ah nos mains fondues ensemble

d’une cire rosâtre consolidée

sommes-nous des mannequins aux émotions amples

sommes-nous un dramatique tableau contrefait

 

ne rien dire

ne rien faire

surtout pas en public

jamais

entends-tu

jamais

 

je sais que nous ne devrions pas

que nos lèvres n’ont pas été conçues

pour gommer la poisseuse poix

qui envahit nos têtes quand l’autre regarde l’une

face à face et cœur à cœur

ce n’est plus un simple flirt

je me donne encore

à ta carnation myrte

que mes yeux dévorent

que ma langue lèche

tout en faisant en sorte

de ne pas tomber dans leur piège

visqueux et présent à chaque instant

ils m’ont dit de me repentir

devant l’église dieu les saints me commandant

devant leurs nez j’ai ris

je n’ai pas fait vœu de pénitence

n’en déplaise aux hétérogènes

dont le couple vit au son des anges

qui sonnent le nouveau-mort le dernier-né

 

ne rien dire

ne rien faire

surtout pas en public

jamais

entends-tu

jamais

 

tout de notre histoire cloche

aucune de mes rimes n’est une rime

le tic-tac de l’horloge

est détraqué mes strophes sont versatiles

seuls des mots et des mots et des mots

j’ai anéanti la ponctuation

les espaces annoncent d’un commun accord

l’arrêt de cette immuable fin

 

ne rien dire

ne rien faire

surtout pas en public

jamais

entends-tu

jamais

 

seul est direct le refrain

toujours à l’appel quand je le sonne

il retranscrit ce que pensent les gens

que notre amour assomme

 

notre emboîtement imparfait

il manque quelques choses

notre regroupement imparfait

pour le dire c’est trop précoce

notre rattachement imparfait

rien n’est naturel

notre contact imparfait

seul le diable fait pareil

 

nous

nous imparfaites

 

 

Étoile est un.e poète.sse non-binaire. Dans « imparfait », ael relate une relation saphique, décriée par la société homophobe. Ce poème ne possède ni restriction de métrique, ni rime, ni ponctuation. Le titre est volontairement masculin, renvoyant à l’absurdité de la règle « le masculin l’emporte sur le féminin », les deux protagonistes étant définis comme féminins.

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